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Le sans-abrisme, une compétence usurpée ?

Le gouvernement fédéral a pris la décision de supprimer le financement du Plan Grand Froid, juste avant l’hiver. Une annonce brutale qui laisse des milliers de personnes sans-abri encore plus exposées, et qui traduit un mépris inquiétant envers une population déjà fragilisée.

BAPN, aux côtés du RWLP, ne peut que dénoncer ce choix. Si la fin du Plan avait été accompagnée d’investissements renforcés dans des solutions structurelles comme le Housing First, l’accompagnement social et de santé, la prévention ou encore un accueil digne des personnes extra-européennes et intra-européennes (notamment les Roms) qui devraient trouver refuge dans notre pays, nous aurions pu nous en réjouir. Mais il n’en est rien : le budget est purement supprimé.

Se désolidariser d’un dispositif déjà insuffisant mais vital en période de grand froid, c’est abandonner les plus vulnérables. C’est aussi ignorer que le sans-abrisme résulte de politiques fédérales malmenées : statut cohabitant délétère, absence de solutions après une hospitalisation, manque de moyens face aux violences faites aux femmes, endettement non maitrisé, inaction climatique, sortie de prison sans accompagnement, fragilisation de la sécurité sociale, etc.

Pour BAPN et le RWLP, il s’agit d’un nouveau signal alarmant : les réponses structurelles pour éradiquer la pauvreté et lutter contre les inégalités sont absentes. Se désengager même des mesures « sparadraps » au moment où les politiques actuelles aggravent l’appauvrissement, c’est une honte !

Lire le communiqué de presse dans son entièreté ci-dessous ou en cliquant sur ce lien : Communique-de-presse-une-population-accablee-comme-une-competence-usurpee-une-honte.pdf


Le gouvernement fédéral a pris la décision de couper les moyens du « Plan Grand froid » annuel. Il vient de l’annoncer, juste avant l’hiver. Cette décision soulève notre effarement, alors que plusieurs milliers de personnes sans-abri survivent grâce à ces mesures hivernales. Sous prétexte qu’il s’agirait d’une compétence usurpée, le choix posé par le fédéral affiche son mépris pour la population – de plus en plus - malmenée.

Le Réseau wallon de lutte contre la pauvreté (RWLP) et le Réseau Belge de Lutte contre la Pauvreté (BAPN) se réjouiraient si l’information venue du fédéral à l’entame de l’automne était accompagnée d’une proposition du genre : « Nous supprimons le "Plan Grand froid" comme réponse au sans-abrisme, parce que nous déplaçons ces budgets, et nous les augmentons, vers les politiques qui donnent des résultats structurels, durables... c'est à dire vers le Housing First, vers de l'accompagnement social-santé en quantité-qualité dans la proximité, vers la prévention pour tarir les causes qui sont à l'origine du sans-abrisme, pour assurer un accueil correct des populations qui venant de l’étranger trouvent refuge en Belgique... ».

Mais il n'en est rien : pour le fédéral, le budget est supprimé, point. Dans cette petite guerre du renvoi des responsabilités ailleurs, les populations déjà à terre dans notre pays font l’objet d’une déconsidération fédérale accablante. Et pas uniquement pour les personnes sans emploi. Car oui dramatiquement, il y a des travailleurs et des travailleuses ou des personnes en formation, sans chez eux, qui dorment aussi chez l'un, chez l'autre, dans leur voiture... ce qui rend leur quotidien encore plus difficile.

Se retrouver sans toit c’est le drame que vivent un nombre croissant de personnes, cassées par les accidents de la vie, ces éléments douloureux qui font qu’un moment donné on perd pied. Pourtant les politiques fédérales laissent à l'abandon, gèrent mal ou n’investissent pas dans des solutions durables. Pensons au statut cohabitant délétère qui brise des familles, qui met des jeunes à la rue ; aux sorties de séjours hospitaliers pour les personnes fortement vulnérabilisées qui dispose de trop peu de moyens ; au manque de moyens de la justice et des services connexes pour agir plus vite et mieux dans le cadre des violences faites aux femmes ; aux politiques en charge de l'endettement qui peut plonger ou maintenir dans la rue ; au non-accueil des personnes extra-européennes et intra-européennes (notamment les Roms) qui devraient trouver refuge dans notre pays ; à l’inaction climatique qui crée des drames familiaux pour les plus vulnérables, pouvant jeter dans l’errance ; à l'accompagnement et la préparation de la sortie de prison totalement délaissés - comme la prison dans son ensemble d’ailleurs - ; à la déstructuration des politiques protectrices de notre système de sécurité sociale ; à la politique globale de lutte contre la pauvreté beaucoup trop peu investie sur le fond et à travers des budgets, etc. Faut-il encore en ajouter à la liste pour attester de la responsabilité de ce niveau de pouvoir lui-aussi ?

D’autant qu’on ne peut ignorer le fait que le niveau politique fédéral est compétent pour certains aspects du sans-abrisme en tant que tel : la prime d'installation, l'adresse de référence et l'aide des CPAS aux personnes SDF. En d'autres termes, le sans-abrisme est au moins une compétence partagée.

Pour le RWLP et BAPN, le gouvernement fédéral montre une fois encore que les réponses structurelles en matière d’éradication de la pauvreté et de combat contre les inégalités sont absentes de ses intentions... Il va jusqu’à rejeter les mesures sparadrap acquises jusqu’ici aux autres entités. Certes le Plan Grand Froid n'est qu’un emplâtre sur une jambe de bois mais se désunir autour de cet emplâtre au moment où plusieurs mesures vont conduire à plus d'appauvrissement... c’est un comble ! Se désolidariser du financement est une honte !

Alors que vont se faire sentir les effets cumulatifs d’une série de mesures comme les exclusions du chômage sans garantie d’une aide sociale, le durcissement de l’accueil des personnes migrantes, le RWLP et BAPN se battront contre ce modèle politique qui réduit la population à un paquet de dépenses à compresser le plus possible, qui rejette ses responsabilités et qui prétexte des économies en posant des choix plus qu’étonnants au vu des montants concernés.